1) RÉSIDENCE D’ARTISTE
FILS CROISÉS – KŌSASURU ITO
01.07—28.07.2025
Studio Kura – Itoshima, Japon
Avec le soutient de Kultur | lx – Arts Council Luxembourg
Découvrez plus en détail cette magnifique aventure



Cette résidence d’artiste au Studio Kura, à Itoshima, dans le sud du Japon, m’a offert un espace de création propice à l’exploration de mes pratiques textiles, en lien avec la mémoire, la lignée et la transmission. À la croisée de l’artisanat japonais et des outils numériques contemporains, elle a permis un dialogue sensible entre le textile et le langage, entre le geste et le signe, entre les surfaces visibles et les souvenirs enfouis.
Ce projet s’inscrit dans la continuité de ma pratique, initiée bien avant ma participation au pavillon luxembourgeois à Osaka, où mes œuvres avaient déjà été présentées au début de l’année. La résidence a prolongé et enrichi ce travail, offrant de nouveaux espaces de résonance et d’expérimentation.
Au fil de cette période, j’ai partagé des fragments de mon processus — images, vidéos, textes — explorant des matières et textures intimement liées à mes origines franco-égyptiennes et chaïouies. Les franges, en particulier, tissent un pont entre mémoire personnelle et univers textile, traduisant à la fois le geste et l’histoire. Le projet s’est déroulé en deux temps : une phase initiale de production à Luxembourg, suivie d’une phase en résidence au Japon, donnant naissance à un assemblage de pièces hybrides, reflet de la mixité de deux territoires, de deux temporalités de création et de mes héritages culturels.
2) EXPO 2025 PAVILLON LUXEMBOURGEOIS – OSAKA
08.08—16.08.2025
Avec le soutient de Kultur | lx – Arts Council Luxembourg


Depuis plus d’un an, je développe ce langage textile en vue de cette exposition , profondément ancré dans mon histoire familiale et culturelle. Chaque motif, chaque fil raconte une histoire intime, engagée dans une démarche activiste dédiée aux femmes.
Récemment, une partie de ce travail a été présentée au Pavillon luxembourgeois de l’Expo Universelle d’Osaka — un immense merci pour ce soutien et cette visibilité internationale, rendus possibles grâce à Kulturlx.
En parallèle, je poursuis mes expérimentations sur des assiettes en céramique, prolongement de mon langage textile. Ces recherches, commencées en 2022, s’inscrivent dans un processus long et réfléchi, que je continue de documenter à travers images et vidéos. Elles ont aussi pris place à l’international, lors de ma résidence en Égypte en novembre 2024, puis plus récemment au Japon.
Les techniques textiles sont anciennes et font partie d’un patrimoine collectif. Pourtant, leur réinvention ne peut se faire sans une appropriation intime : c’est l’histoire personnelle, les références culturelles et les choix esthétiques qui leur donnent leur sens et singularité.
Il est tout à fait légitime de puiser dans ce langage universel. Ce qui questionne, c’est lorsque certaines formes ou signes — porteurs d’une mémoire, d’un contexte, d’un symbole — sont repris sans leur charge initiale, vidés de leur ancrage, et réduits à de simples effets visuels.

Soleil levant – Aïda Schweitzer 2025 – Tissus assemblés, broderies, frange 111 x 89,5 cm – 𝐸𝑥𝑝𝑜 2025 𝑂𝑠𝑎𝑘𝑎: 𝐿𝑒 𝑝𝑎𝑣𝑖𝑙𝑙𝑜𝑛 𝑑𝑢 𝐺𝑟𝑎𝑛𝑑-𝐷𝑢𝑐ℎ𝑒́ 𝑑𝑒 𝐿𝑢𝑥𝑒𝑚𝑏𝑜𝑢𝑟𝑔
Aïda Schweitzer 2025 – Tissus assemblés, broderies, frange 111 x 89,5 cm – 𝐸𝑥𝑝𝑜 2025 𝑂𝑠𝑎𝑘𝑎: 𝐿𝑒 𝑝𝑎𝑣𝑖𝑙𝑙𝑜𝑛 𝑑𝑢 𝐺𝑟𝑎𝑛𝑑-𝐷𝑢𝑐ℎ𝑒́ 𝑑𝑒 𝐿𝑢𝑥𝑒𝑚𝑏𝑜𝑢𝑟𝑔
Je constate aujourd’hui que certains codes que j’explore depuis plusieurs années — au croisement de la broderie, de l’écriture, du textile et du rituel — réapparaissent dans des contextes où leur signification d’origine est effacée, tout comme leur sens profond. Cela contribue à invisibiliser davantage ces héritages, en perpétuant des postures postcoloniales.
Ce constat soulève pour moi des questions cruciales sur la circulation des formes, la mémoire collective et l’effacement symbolique qui s’opèrent dans certains usages contemporains.
« Quand certaines formes voyagent, elles s’habillent d’esthétique mais parfois oublient leur histoire. Cette mémoire enfouie porte le poids des luttes, des vécus, des communautés. En tant qu’artiste racisée et adoptée, cette mémoire est pour moi une ancre profonde, un héritage à préserver et à transmettre. Interroger cette différence, c’est inviter à reconnaître la richesse qui dépasse la simple beauté — à entendre ce que ces formes racontent au-delà du visible.
Dans mon travail, je cherche à faire vivre cette mémoire, à lui redonner voix et force, car sans cette histoire, l’esthétique peut devenir une simple surface, une forme sans profondeur.
C’est une invitation à réfléchir à ce que l’on emprunte, à ce que l’on transmet, et à ce que l’on oublie parfois.

Photo ©GIE Luxembourg @Expo 2025 Osaka_Ondrej Piry – 𝐸𝑥𝑝𝑜 2025 𝑂𝑠𝑎𝑘𝑎: 𝐿𝑒 𝑝𝑎𝑣𝑖𝑙𝑙𝑜𝑛 𝑑𝑢 𝐺𝑟𝑎𝑛𝑑-𝐷𝑢𝑐ℎ𝑒́ 𝑑𝑒 𝐿𝑢𝑥𝑒𝑚𝑏𝑜𝑢𝑟𝑔
𝐋𝐞𝐬 𝐜𝐨𝐫𝐩𝐬-𝐩𝐚𝐲𝐬𝐚𝐠𝐞𝐬 𝐝’𝐀𝐢̈𝐝𝐚 𝐒𝐜𝐡𝐰𝐞𝐢𝐭𝐳𝐞𝐫 : 𝐮𝐧𝐞 𝐠𝐞́𝐨𝐠𝐫𝐚𝐩𝐡𝐢𝐞 𝐫𝐞́𝐟𝐥𝐞𝐱𝐢𝐯𝐞 𝐚̀ 𝐎𝐬𝐚𝐤𝐚
Cette œuvre d’Aïda Schweitzer pour l’Exposition universelle à Osaka au Pavillon luxembourgeois révèle la singularité d’une démarche artistique profondément ancrée dans son histoire personnelle. Franco-égyptienne et adoptée, l’artiste a développé au Luxembourg une approche textile unique,
puisant dans les mémoires plurielles qui l’habitent et les pratiques ancestrales des tapisseries où se tramaient les récits du monde. Cette maîtrise technique particulière, nourrie par des années de recherche sur les savoir-faire textiles et une réflexion intime sur l’appartenance, lui permet de réinterpréter ces héritages dans un langage contemporain d’une rare cohérence. Son vocabulaire visuel, né de cette alchimie entre mémoire personnelle et savoir-faire maîtrisé, se reconnaît désormais à sa signature esthétique distinctive.
Ces arbres roses et verts fonctionnent comme des architectures de résistance issues d’une vision du monde façonnée par l’expérience de l’entre-deux. Les motifs textiles, puisés dans ses recherches approfondies sur les héritages vernaculaires, défient l’hégémonie des codes occidentaux. Chaque personnage semble négocier sa place dans ce territoire réinventé, miroir des questionnements identitaires qui nourrissent la pratique de l’artiste depuis ses débuts. L’artiste active ici une pratique décoloniale nourrie par son parcours singulier : elle déplace les imaginaires dominants pour révéler les violences invisibles de nos représentations, forte d’une légitimité artistique construite par quinze années de recherche plastic. Un art contemporain qui milite pour d’autres mondes possibles, révélant une singularité artistique qui lui est propre et reconnaissable.
𝐶𝘳𝑖𝘵𝑖𝘲𝑢𝘦𝑠 𝑑𝘦 𝘱𝑒𝘯𝑠𝘦́𝑒𝘴 𝘢𝑛𝘰𝑛𝘺𝑚𝘦𝑠, 𝘦𝑥𝘵𝑟𝘢𝑖𝘵 𝘥’𝘶𝑛𝘦 𝘳𝑒𝘯𝑐𝘰𝑛𝘵𝑟𝘦 avec 𝘭’𝘢𝑟𝘵𝑖𝘴𝑡𝘦 𝘢̀ 𝘐𝑠𝘵𝑎𝘯𝑏𝘶𝑙, 2025

Photo ©GIE Luxembourg @Expo 2025 Osaka_Ondrej Piry – 𝐸𝑥𝑝𝑜 2025 𝑂𝑠𝑎𝑘𝑎: 𝐿𝑒 𝑝𝑎𝑣𝑖𝑙𝑙𝑜𝑛 𝑑𝑢 𝐺𝑟𝑎𝑛𝑑-𝐷𝑢𝑐ℎ𝑒́ 𝑑𝑒 𝐿𝑢𝑥𝑒𝑚𝑏𝑜𝑢𝑟𝑔
𝐅𝐢𝐠𝐮𝐫𝐞 𝐬𝐢𝐧𝐠𝐮𝐥𝐢𝐞̀𝐫𝐞 𝐝𝐚𝐧𝐬 𝐥’𝐚𝐩𝐩𝐫𝐨𝐜𝐡𝐞 𝐭𝐞𝐱𝐭𝐢𝐥𝐞 𝐚𝐮 𝐋𝐮𝐱𝐞𝐦𝐛𝐨𝐮𝐫𝐠
L’artiste explore la puissance latente des motifs ornementaux : domestiqués par des siècles de tradition décorative, ils conservent ici leur force sauvage. Inspirée par une résidence au Caire et par ses recherches sur les pratiques textiles ancestrales, elle mêle bestiaires hybrides et entrelacs géométriques, empruntés à l’iconographie médiévale mais traversés de détails contemporains.
Ce télescopage temporel trouble le regard : les codes de la tapisserie flamande y sont reconnaissables, mais fissurés par des anachronismes. La découpe en festons, héritée des bordures anciennes, acquiert une dimension sculpturale ; suspendue, elle projette ombres et lumières, donnant vie au tissu et à ses créatures indociles.
Tiger affirme la persistance paradoxale de l’ornement dans l’art contemporain : à la fois désuet et nécessaire, il révèle nos liens complexes à la tradition et à la modernité. Le bestiaire récurrent de l’artiste, issu de son univers du dessin, dialogue avec l’iconographie historique pour tisser une mythologie personnelle en mouvement, appelée à se déployer vers d’autres territoires plastiques et géographiques, d’Istanbul au Caire.